Idées cadeaux pour la fête des mères... de 1946
Voici le mois de mai, mois du brin de muguet mais aussi de la fête des mères. Contrairement à ce qui a parfois été dit, cette célébration n’est pas une création du Maréchal Pétain mais lui est bien antérieure. Des initiatives françaises apparaissent localement dès le début du XXe siècle, et la première « fête des mères de famille nombreuse » est organisée au niveau national en 1920. Après la saignée provoquée par la Première Guerre mondiale, l’Etat français met en oeuvre une politique nataliste visant à repeupler la France. Malgré un début d’émancipation pendant le conflit, la femme est réinsérée dans le modèle traditionnel de bonne épouse au foyer, mettant au monde et éduquant les enfants qui relèveront le pays. Le dernier dimanche de mai, mois traditionnellement associé à la Vierge Marie, est retenu pour cette nouvelle fête.
Souhaitant mettre à l’honneur les valeurs de sa devise, « Travail, Famille, Patrie », le Maréchal Pétain ne fait qu’ajouter officiellement la date aux célébrations nationales, en 1941. Il vise ainsi à encourager les femmes françaises qui ont perdu des proches à la guerre, ou dont les fils et époux sont prisonniers en Allemagne ou affectés au travail obligatoire, le STO. Comme toute fête nationale, il s’agit également de créer un consensus autour d’une figure que chacun affectionne.
La fête des mères est maintenue à la Libération, et tous les préfets reçoivent donc en 1946 une lettre circulaire du ministère de la Santé publique et de la population, dont une copie a été conservée dans le fonds de la sous-préfecture de Saint-Flour. Datée du 25 avril, cette lettre préconise que l’événement soit célébré « avec tout l’éclat qui convient ». L’organisation est confiée aux Unions départementales des associations familiales, créées en 1942 et confirmées en 1945, qui sont chargées de représenter les familles et de défendre leurs intérêts devant les pouvoirs publics.
Pour cette fête des mères, il ne s’agit pas simplement de prononcer des discours, mais de rendre un véritable hommage assorti de récompenses non négligeables, identiques sur tout le territoire. Les mères se voient remettre un diplôme, la médaille de la famille nombreuse dont le métal varie en fonction du nombre d’enfants qu’elle élève (bronze pour cinq enfants, argent pour huit et or pour dix enfants et plus) et, en cette période de ravitaillement difficile, des tickets de rationnement. Ces tickets leur permettront de s’approvisionner en denrées de première nécessité, comme le charbon ou le savon, d’acheter des objets d’usage quotidien comme des draps ou des chaussures, mais aussi de recevoir des produits de luxe : une mère de 10 enfants obtient ainsi 3 kg de sucre et 2,250 kg de chocolat, de quoi régaler toute la famille.
Même après la dissolution du gouvernement de Vichy, la France reste fortement attachée aux valeurs morales, à l’honneur, à la glorification du travail honnête. Les demandes ou propositions d’attribution de la médaille sont déposées en mairie et font l’objet d’une enquête de la Commission départementale de la médaille de la famille française présidée par le préfet, afin de vérifier que les enfants soient élevés selon ces bons principes.
Aujourd’hui, les critères d’attribution de cette médaille se sont assouplis et la fête familiale a remplacé la cérémonie officielle. Et même si les cadeaux n’atteignent pas toujours la valeur d’alors, le plaisir des mamans est resté le même....
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